Voix de Gausson : 23 mai 1915

La lettre suivante est d’un paroissien de Gausson. Blessé déjà une fois, il est retourné aussitôt guéri sur le front où il prend part, presque chaque jour, à des attaques ou contre-attaques contre l’ennemi qui semble dans ce secteur plus obstiné que partout ailleurs.

Me voici de nouveau au feu. Les canons de tous calibres vomissent l’horrible mitraille, mais rien n’est si terrible que les bombes qui nous arrivent de tous côtés. Nous aussi en lançons tant et plus. La terre est complètement remuée à un mètre de profondeur. Le bois est rasé entre les tranchées qui se trouvent ici à 12, 15 et 20 mètres les unes des autres. Jamais la guerre ne fut plus terrible. Tous les jours, il y a quelques morts et des blessés. Mon secteur est particulièrement dur…

Même ici, cependant, la nature est en fête : les pommiers (ce qu’il en reste) sont en fleurs, les arbres bourgeonnent, le parfum de l’aubépine combat les mauvaises odeurs de la tranchée. Néanmoins, nous sommes pensifs. Nos parents, nos amis, notre cher pays est loin. Oh ! de loin surtout, qu’elle est belle la Bretagne avec ses jolis clochers ! Dans notre paisible église de Gausson, faites bien prier pour nous, le dimanche et le soir.

Au camp, j’ai assisté à la messe, nous étions bien 600…L’église était archipleine…

J. caporal