Voix de Gausson : 11 juillet 1915

Lettre d’un jeune brave

Bien chers parents

Je vous envoie ces quelques mots pour vous dire que, si jamais je ne vous avais parlé de ce que nous faisions, je crois qu’à l’heure actuelle, il est bon que je vous parle et que vous sachiez ce que nous allons faire.

Donc, ce soir, ici même, nous avons une grande attaque comme il ne s’en est encore peut-être pas produit depuis le début. Pour cette attaque, je crois que nous autres, bretons et vendéens du …corps, nous sommes prêts et nous nous sentons forts, car depuis bien des semaines déjà nous nous préparons.

Donc, demain matin, au petit jour, nous nous lèverons pour de bon… Il se peut que d’ici quelques jours vous n’ayez pas de mes nouvelles. Aussitôt que je le pourrai, je vous écrirai. Seulement, sachez bien que ces jours-ci, il y aura des victimes et des sacrifices et que peut-être, je serai de ceux-là. Dans tous les cas, je ferai mon devoir. Seulement, ne soyez pas inquiets outre mesure, car si je tombe, j’aurai au moins la consolation d’avoir eu le temps de bien me préparer. Ce matin, j’ai communié, je tomberai donc en chrétien. Beaucoup n’auront pas cette consolation.

A l’heure où vous recevrez cette lettre, tout sera passé et je termine en vous embrassant et en vous engageant à bien prier pour votre fils. Espérons que Dieu me protègera et ne m’abandonnera pas. Je crois et j’espère que cela se passera bien mais si c’est là que je dois rester (car Dieu fait à sa volonté) soyez sûrs que j’aurai fait mon devoir de bon français et de bon défenseur de la France, grande et libre… car ce sera pour délivrer notre sol de ces misérables bandits.

Je termine en vous disant à bientôt.

L.H .